Dans L'Equipe aujourd'hui, mais ça n'apporte rien de nouveau:
Monfils en prolongations
Solide hier face à Benneteau, le Français, opposé à Cilic en quarts, puise dans ses réserves pour tenter de s’offrir un coup d’éclat au POPB.
GAËL MONFILS est un fieffé coquin. À l’écouter le mercredi, il est à ramasser à la petite cuillère. « Je tombe tout le temps sur le court parce que je n’ai plus assez de force dans les jambes. Mes coups ne sont pas tenus, mes abdos ne tiennent pas le coup, énumérait-il sur son « physique de chèvre » après une victoire compliquée face à Guez. Depuis l’Asie, c’est la chute grave. Le tremplin à l’envers ! Me sentir aussi faible, je suis défait… »
Sans doute que la perspective d’affronter Federer au tour suivant avait aussi affaibli les défenses immunitaires inconscientes. Mais dans la nuit, Monfils s’est réveillé pour un pipi nocturne, rallumant son portable où clignotait un SMS lui annonçant l’exploit de Benneteau. Et soudainement, les perspectives ont changé. Le tout mou est redevenu le soldat créole. « Parce que contre Julien, je suis favori, expliqua-t-il après sa qualification presque tranquille en quarts de finale (6-4, 6-3). Et je me suis comporté en patron. Je suis un homme de challenge, malgré un manque de jus évident. Et puis ici, il y a ma famille, mes potes, qui sont mon moteur de soldat. À Shanghai, cela aurait peut-être été différent… »
« Je me suis réveillé du bon pied ! »
Dans la liste des commissions à respecter, le Français avait aussi à composer avec le diktat du très peu commode coach Roger Rasheed, lui demandant de lui montrer « ce qu’est un professionnel du premier au dernier point ». Et Monfils fut un bon pro, prolifique en aces (14) et en accélérations fatales. Au moment de conclure sur un break au premier set, il convoqua la réussite par le biais de deux retours décentrés. Et sur les six balles de break à défendre, le service gagnant fut bien souvent l’arme la plus commode à dégainer. À 4-1, 30-30, dans la seconde manche, il gratifia enfin les aficionados d’un point made in Monf’ pimenté de quelques allers-retours filet-fond de court, enjolivé par le passing final entre les jambes.
Lui, la momie ? Monfils tenta d’éluder la question relative à la métamorphose entre les deux tours. « Je me suis réveillé du bon pied ! J’ai fait un travail mental pour rassembler mon énergie et Julien a fait les frais de ce “rassemblement” parce que je savais qu’il fallait prendre la balle plus tôt et frapper fort. Et puis il n’y a pas eu d’échanges super violents, ce n’était que des déplacements naturels dans la diagonale. Je m’attendais à ce que Julien soit plus agressif, mais ce n’était pas évident pour lui d’enchaîner après le match de sa vie… »
Ni vrai, ni tout à fait faux selon le principal concerné, la tête dans les étoiles l’espace de quelques heures seulement avant que la dure réalité du circuit perpétuel ne le rattrape. « Forcément, j’y ai laissé de l’influx, soupira Benneteau. Mais ce n’était pas trop dur de revenir sur terre. Seulement, quand Gaël joue comme ça, avec beaucoup d’opportunisme, il est parmi les meilleurs du monde… » Un temps dans le top 10 cette saison, Monfils n’a pourtant pas réalisé l’année adéquate pour lui, entre les coups de pompe automnaux et les genoux qui tirent depuis le printemps. Vainqueur de Nadal à Doha, soulevant le trophée à Metz, quart-finaliste à Roland-Garros, il est toujours à la recherche du très gros coup pour faire aussi oublier sa triste campagne de Coupe Davis (défaite contre De Bakker). Pas du genre à se contenter d’un quart de finale à Bercy, fût-il le premier de sa carrière, il espère au moins connaître face à Cilic l’adrénaline d’un match porté par les ferveurs du turbulent POPB. « Parce que pour l’instant, j’ai pas eu de cul à jouer deux fois contre un Français ! » Mais aura- t-il suffisamment d’essence pour enflammer la place ?
FRANCK RAMELLA
Le pied Marin
Adversaire aujourd’hui de Gaël Monfils, Marin Cilic est la révélation de cette saison.
REPOUSSÉ SUR LE COURT N° 1 où le plafond semble à peine assez élevé pour sa grande taille (1,98 m), Marin Cilic (13e mondial) va enfin évoluer aujourd’hui dans une arène à la hauteur de son talent. Le cadet des joueurs encore en course (21 ans) a dû batailler pour se hisser en quarts. Le qualifié Kubot lui avait pris un set au deuxième tour. C’est à nouveau en trois manches qu’il s’est imposé hier (3-6, 6-3, 6-4), face à Fernando Verdasco (8e). Le Croate originaire de Bosnie-Herzégovine est en forme en cette fin de saison. Il a enchaîné une finale à Vienne (battu par Melzer), un quart à Bâle (Stepanek) et se retrouve donc à nouveau en quarts à Bercy.
On connaît les qualités de l’ancien protégé de l’entraîneur français Boris Vallejo : un service (mais qui paraît un peu en panne ici) et des frappes à plat un peu dans le style de Del Potro. Ce même Argentin qui avait mis fin à son rêve à l’US Open alors qu’il avait réussi un exploit en atomisant Nadal. A-t-il les moyens de déborder la défense spectaculaire de Monfils ? Une seule certitude : les deux hommes ne se sont jamais croisés. « Même pas à l’entraînement », racontait hier le Français. Roger Rasheed, son entraîneur, y voyait là une excellente opportunité de se jauger : « C’est le type même de joueur qu’on doit s’attendre à rencontrer dans un quart de tournoi du Grand Chelem. »
Comment le Croate va-t-il aborder ce match capital, qui pourrait lui ouvrir la première demi-finale de sa carrière dans un Masters 1000 ? En tout cas sans le soutien physique de son coach Bob Brett. « Il n’a pas pu se libérer », expliquait Vinko Cilic, le frère aîné de Marin, qui est seul pour faire la claque et qui avoue ne pas avoir de connaissance particulière en matière de tennis. Mais Marin est un garçon grand et un grand garçon. Il peut sans doute résoudre l’équation Monfils tout seul.