La croisée des chemins
Paul-Henri Mathieu, vainqueur de Gonzalez, s’épanouit. Monfils, battu par Monaco, doute. La roue tourne vite.
AU CLASSEMENT ATP de cette semaine, Paul-Henri Mathieu, vainqueur à Casablanca, et Gaël Monfils, qui n’avait pas rejoué depuis son premier tour raté à Monte-Carlo, se sont croisés. PHM est aujourd’hui 42e mondial et Monfils, qui le devançait, 45e. L’un se lance à l’assaut du top 15, l’autre, installé sur une pente savonneuse, tente de résister. Hier, Paul-Henri Mathieu a sorti Fernando Gonzalez (6e) en deux sets sans bavure, malgré une pluie fine qui donnait aux balles une circonférence et un poids anormaux. Lundi, Gaël Monfils s’inclinait sans gloire face à Juan Monaco (52e), du type Argentin laborieux. Et tandis qu’on peut facilement imaginer Paul-Henri Mathieu, droit dans ses bottes, décrocher une deuxième finale d’affilée comme en 2002, il est difficile de ne pas s’inquiéter pour un Gaël Monfils qui semble avoir perdu le nord.
Lundi, sur un « centralito » bien garni, il avait très bien commencé avant de se cogner le genou gauche dans un panneau de publicité sur une course latérale. Malgré quelques grimaces et boitillements, il arriva rapidement à 5-2 en sa faveur, sous les yeux des joueurs français qui l’observaient, curieux du résultat. Mais sur les cinq jeux suivants, Monfils ne marqua que trois malheureux points : « Sept bois, douze fautes directes », résuma Olivier Delaitre, son coach, un peu désemparé. En empochant le deuxième set 6-1, Monfils fit renaître l’espoir de gagner enfin un match.
Las, en perdant au total quatre fois son service au troisième, il signa lui-même son arrêt de mort. « Je n’arrive pas trop à expliquer… Je ne sais pas. En ce moment, je n’ai pas trop de confiance… », déclara le Français, dépité. À chaud, impossible de lui soutirer l’ombre d’un début d’explication : « En ce moment, je ne sais rien. Je suis dégoûté, c’est tout. »
À croire que la perspective de redescendre au classement l’effraie davantage de semaine en semaine, bien qu’il affirme le contraire : « Je vais juste descendre, et voilà. C’est la vie, la roue tourne. On ne sait jamais : je suis arrivé à Rome l’an dernier, j’avais gagné zéro match, comme cette année (en fait il en avait remporté deux, un à Barcelone et un à Estoril). Et j’ai atteint les demi-finales, alors… »
« On dirait du cristal »
C’est bien le problème. Car s’il ne fait pas mieux dans deux semaines, il va perdre 225 points et se retrouver aux alentours de la 80e place mondiale. En plus, pour l’heure, il n’est pas sûr d’être admis dans le tableau principal en Italie. Il lui faut attendre deux défections. Et il n’est pas inscrit dans les qualifications. Il a déjà rayé Hambourg au profit d’un challenger à définir, « pour essayer d’enchaîner des victoires », explique Delaitre, et après… « Après, il y a Roland, dit Monfils. Peut-être que devant ma famille, on ne sait jamais, je peux m’enflammer. Mais là, je suis un peu gavé, ça me saoule. »
Que peut-on lui souhaiter pour l’instant ? « Rien, du courage, je n’en sais rien… Au pire, si je descends, eh bien, je reviendrai plus fort ! Descendre, cela ne peut que m’aider. » Et pendant ce temps-là, Paul-Henri Mathieu, qui, lui aussi, a plusieurs fois coulé pour diverses raisons, s’est offert un quatrième succès contre un top 10 cette année et un troisième d’affilée sur le Chilien qui, faut-il ajouter, n’a plus rien fait depuis sa finale à l’Open d’Australie. Encore une histoire de confiance perdue : « Les joueurs sentent ces choses-là, explique Mathieu. Lui n’est pas en confiance et moi, je le suis. Les conditions étaient difficiles et j’ai mieux tenu que lui dans la tête. » C’est pourquoi PHM ne s’inquiète pas pour Monfils : « Si ça se trouve, à la fin de l’année, tout le monde va l’encenser parce qu’il sera 20e mondial ! » Thierry Champion, son coach, qui a été aussi celui de Monfils, ne s’en fait pas plus pour son ancien élève : « Il a entamé un travail avec Olivier (Delaitre). Il faut leur laisser le temps. » Même son de cloche du côté de Richard Gasquet, vainqueur hier de Max Mirnyi : « Gaël n’est vraiment pas bien, ça se voit.Mais je ne m’en fais pas pour lui. Au tennis, beaucoup de choses se passent certes dans la tête mais c’est aussi technique. On peut vite perdre ses acquis. C’est un travail de toutes les minutes. Qu’il ne lâche rien et ça va repartir… » Pour sa part, Delaitre était circonspect. Il réclame à son protégé davantage de constance : « Il se bat bien mais il y a toujours un petit truc qui fait que... Gaël, en ce moment, on dirait du cristal. » Et Paul-Henri Mathieu, du bois dont on fait les champions. DOMINIQUE BONNOT
Il ne devrait pas jouer Hambourg, c'est peut-être pas une mauvaise décision pour lui, mais ça ne m'arrange pas du tout parce que je me tâtais pour y aller justement au début du tournoi (j'habite en Allemagne) et j'aurais vraiment voulu voir Gael, notamment à l'entraînement avec Delaitre...